Qui n’a jamais ouvert un booster Pokémon avec des mains tremblantes dans la cour de récré ? Qui n’a jamais ressenti ce petit frisson en découvrant une carte brillante, une « holo » qui faisait de nous le roi ou la reine de la journée ? On a tous connu ça. On échangeait nos doubles, on mettait nos trésors dans des classeurs, loin d’imaginer que, 25 ans plus tard, certaines de ces mêmes cartes s’échangeraient pour le prix d’une villa de luxe ou d’une supercar.
Bienvenue dans le monde fou de la collection de cartes Pokémon à très haut niveau. Un univers où la nostalgie est devenue un marché d’investissement ultra-spéculatif, où des collectionneurs et des célébrités sont prêts à dépenser des fortunes pour obtenir le Saint Graal. Oubliez le Bitcoin, oubliez l’immobilier, aujourd’hui, on va parler de morceaux de carton qui valent de l’or.
On a épluché les dernières ventes aux enchères et on vous a préparé le classement ultime des cartes Pokémon les plus chères du monde. Accrochez-vous bien, car les montants que vous allez voir sont absolument délirants.
Qu’est-ce qui rend une carte Pokémon si chère ?
Avant de plonger dans le top 10, reprenons les bases : comment un simple bout de carton peut-il atteindre une valeur de plusieurs millions d’euros ? Le prix d’une carte Pokemon n’est pas une science exacte mais il est déterminé par une combinaison de facteurs extrêmement précis :
L’état de la carte : la quête de la perfection
C’est le critère le plus important. Une carte sortie d’un booster et immédiatement protégée n’aura pas la même valeur qu’une carte qui a traîné dans une poche. Pour officialiser cet état, les collectionneurs font appel à des sociétés de notation (ou gradation) comme PSA (Professional Sports Authenticator) ou Beckett (BGS).
Ces experts examinent la carte sous toutes les coutures (centrage, coins, bords, surface) et lui attribuent une note de 1 à 10. Une note de PSA 10 Gem Mint (qualité parfaite) peut multiplier la valeur d’une carte par 10, voire 100, par rapport à la même carte en moins bon état. C’est la quête ultime de tout collectionneur.
La rareté et l’édition
Toutes les cartes ne naissent pas égales. Une carte 1ère Édition, reconnaissable à son petit logo Edition 1, est beaucoup plus rare et recherchée que sa version Unlimited (tirage illimité) sortie juste après. Pour le premier set de cartes, il existe même une version intermédiaire Shadowless (sans ombre), très prisée.
De plus, certaines cartes sont des cartes promotionnelles ou des trophées jamais vendues en magasin et distribuées uniquement comme prix lors de tournois officiels, ce qui les rend incroyablement rares.
Le POP Report : le recensement des cartes parfaites
Le POP Report de PSA est un recensement public de toutes les cartes qu’ils ont notées. Si vous avez une carte et que vous voyez que le POP Report indique qu’il n’existe que 10 exemplaires dans le monde en état PSA 10, vous savez que vous détenez un trésor. Plus le POP (la population) d’une carte en état parfait est faible, plus son prix s’envole.
Maintenant que vous êtes des experts, plongeons dans le classement qui fait rêver. Pour information, les prix en dollars ont été convertis au taux de change actuel pour vous donner une idée plus précise.
10. Carte Magicarpe Université Tamamushi (1998) : environ 72 000 €

On commence ce top avec une carte qui prouve que même le Pokémon le plus faible peut valoir une fortune. Cette carte promotionnelle Magicarpe était le prix d’un concours organisé par le magazine Shogakukan au Japon.
Pour l’obtenir, il fallait réussir une série d’épreuves et d’examens très difficiles. Seuls les plus acharnés ont pu mettre la main dessus. L’anecdote géniale, c’est que l’attaque de ce Magicarpe, « Danse du Dragon », est une attaque surpuissante que Magicarpe ne peut normalement pas apprendre. Un clin d’œil à la persévérance des étudiants qui l’ont gagnée.
9. Super Secret Battle No.1 Trainer (1999) : environ 83 000 €

Le nom de la carte dit tout : Super Secret Battle. Cette carte était la récompense pour les gagnants des tournois régionaux au Japon en 1999. Les vainqueurs recevaient cette carte qui leur servait de ticket d’entrée pour la grande finale nationale, un tournoi secret dont le lieu n’était révélé qu’aux détenteurs de la carte.
On estime qu’il n’existe que sept exemplaires de cette carte. Elle représente le rêve de tout dresseur de l’époque : être reconnu comme l’un des meilleurs et accéder à la compétition ultime.
8. Carte No.2 Trainer Championnat du Monde Pokémon (2006) : environ 92 000 €

Encore une carte trophée, mais cette fois-ci d’un championnat du monde ! Remise au finaliste du tournoi mondial de 2006 en Californie, cette carte est un véritable morceau d’histoire de l’e-sport Pokémon.
L’anecdote, c’est qu’il fallait se qualifier via un tournoi national, puis se rendre aux États-Unis pour avoir une chance de la gagner. Il n’en existe qu’un seul exemplaire connu en état PSA 9 Mint. Posséder cette carte, c’est posséder la preuve d’avoir été le deuxième meilleur joueur du monde à une époque.
7. Lugia Neo Genesis 1ère Édition Holographique (2000) : environ 133 000 €

On entre dans le domaine des cartes de set classiques, mais dans leur version la plus parfaite. Lugia est l’un des Pokémon légendaires les plus populaires, et sa première apparition dans le set Neo Genesis était très attendue.
Le problème ? L’impression de cette série était réputée pour ses nombreux défauts, ce qui rend l’obtention d’un exemplaire en état PSA 10 Gem Mint quasiment impossible. Pendant des années, on pensait même qu’aucune ne mériterait cette note. Le jour où un exemplaire parfait a finalement été gradé, sa valeur a explosé.
6. Kangourex Holo Family Event (1998) : environ 138 000 €

Cette carte est l’une des plus touchantes de l’univers Pokémon. Elle était la récompense d’un tournoi japonais unique en son genre, le Parent/Child Mega Battle Tournament, où un parent et son enfant devaient jouer en équipe. Les équipes qui atteignaient un certain nombre de victoires recevaient cette carte promotionnelle.
Le symbole du Pokémon Kangourex, avec son bébé dans sa poche, était un clin d’œil parfait à l’événement. C’est une carte qui représente le partage de la passion Pokémon entre générations.
5. Tsunekazu Ishihara GX Black Star Carte Promotionnelle (2017) : environ 218 000 €

De loin la carte la plus WTF de ce classement. En 2017, pour célébrer le 60ème anniversaire de Tsunekazu Ishihara, le PDG de The Pokémon Company, une carte promotionnelle a été créée… à son effigie !
Elle a été distribuée uniquement aux employés de la société lors de sa fête d’anniversaire privée. L’anecdote incroyable, c’est que la carte a été signée par Ishihara lui-même lors de la vente aux enchères qui a établi ce record de prix. C’est une pièce d’histoire de l’entreprise, un objet de collection unique et complètement décalé.
4. Tortank Galaxy Star Holo (1998) : environ 331 000 €

Cette carte est un prototype, une relique des tout débuts de la création du jeu de cartes Pokémon en Occident. En 1998, la société Wizards of the Coast a imprimé quelques cartes de test pour présenter à Nintendo of America à quoi ressemblerait le jeu.
Seuls deux exemplaires de ce Tortank prototype sont connus. Son dos est différent de celui des cartes classiques, et son effet holographique Galaxy Star est unique. C’est un véritable fossile, un témoin de la naissance du phénomène mondial.
3. Dracaufeu Première Édition (1999) : environ 386 000 €

Le voilà. Le roi, l’icône, le fantasme de toute une génération. Le Dracaufeu holographique de la première édition du Set de Base. C’est LA carte que tout le monde voulait dans la cour de récré.
Aujourd’hui, en état PSA 10 Gem Mint, elle est devenue le symbole du marché de la collection Pokémon. Le rappeur Logic a acheté un exemplaire pour plus de 220 000 $ en 2020, propulsant cette carte dans la sphère mainstream. C’est le Graal pour tous ceux qui ont grandi dans les années 90.
2. Dracaufeu Topsun japonais Scarce Blue Back (1995) : environ 453 000 €

Attention, piège ! Cette carte ressemble à une carte Pokémon, mais n’en est pas une au sens TCG du terme. En 1995, avant même la sortie du jeu de cartes officiel, la société japonaise Topsun a sorti une série de cartes à collectionner distribuées avec des chewing-gums. La toute première impression avait un dos bleu, extrêmement rare, avant de passer à un dos vert.
Ce Dracaufeu Blue Back est donc l’une des toutes premières représentations de Dracaufeu sur une carte, une sorte de rookie card préhistorique. C’est un trésor pour les collectionneurs les plus pointus.
1. Pikachu Illustrator (1998) : Le Saint Graal à plus de 4,8 millions d’€

On arrive au sommet de l’Olympe, à une carte dont le prix dépasse l’entendement. La carte Pikachu Illustrator n’a jamais été vendue en magasin. Elle a été remise comme prix aux 39 gagnants d’un concours de dessin organisé par le magazine japonais CoroCoro Comic en 1998. On estime qu’il n’en reste qu’une vingtaine en circulation. C’est la seule carte qui porte la mention Illustrator au lieu de Trainer et son artwork, dessiné par l’une des créatrices de Pikachu, Atsuko Nishida, est unique.
L’histoire qui a fait basculer cette carte dans une autre dimension, c’est son achat par le youtubeur et célébrité Logan Paul. Il a dépensé 5 275 000 $ (soit plus de 4,8 millions d’euros) pour un exemplaire en état PSA 10, le seul connu à ce jour. Il l’a même portée autour du cou lors d’un combat de catch à WrestleMania. C’est plus qu’une carte, c’est un artefact culturel, le joyau de la couronne de l’univers Pokémon.
Le reste du top 20 : des trésors à ne pas sous-estimer
Le top 10 est fou, mais les dix cartes suivantes ne sont pas en reste ! Voici un aperçu rapide de ces autres pépites :
- Noctali Gold Star (Points EXP) (2005) – environ 64 000 € : une carte japonaise incroyablement difficile à obtenir. Il fallait accumuler 70 000 points d’expérience en participant à des tournois, une tâche colossale qui a pris plus d’un an à certains joueurs.
- Tropical Mega Battle – Tropical Wind Promo (1999) – environ 60 000 € : la récompense d’un des tournois les plus prestigieux des débuts de Pokémon, le Tropical Mega Battle à Hawaï. Une carte au parfum de paradis.
- Mew Victory Orb Trophy (1998) – environ 55 000 € : une carte trophée des tournois japonais Summer Battle Road, où les trois meilleurs joueurs de chaque catégorie d’âge recevaient cette carte sublime.
- Florizarre 1ère édition japonaise (Autographiée) (1996) – environ 50 000 € : un exemplaire du Set de Base japonais sans symbole de rareté (une erreur d’impression très recherchée), signé par l’illustrateur Mitsuhiro Arita lui-même.
- Promo Japonaise No. 2 Trainer (1999) – environ 46 000 € : la carte remise aux deuxièmes places du tournoi Tropical Mega Battle. Presque aussi rare que la carte du vainqueur.
- Poussifeu Gold Star (2004) – environ 46 000 € : les cartes Gold Star représentent des Pokémon chromatiques (shiny) et sont extrêmement rares à trouver dans les boosters. Poussifeu est l’une des plus recherchées.
- Rayquaza Gold Star Holo EX Deoxys (2005) – environ 41 000 € : probablement la Gold Star la plus populaire. Rayquaza est un Pokémon légendaire ultra-charismatique et sa version chromatique est sublime.
- Leveinard 1ère Édition (1999) – environ 41 000 € : une autre carte du Set de Base 1ère Édition. Moins iconique que Dracaufeu, mais tout aussi difficile à trouver en parfait état.
- Dracaufeu Gold Star EX Dragon Frontiers (2006) – environ 25 000 € : le feu sur le feu. La rencontre entre le Pokémon le plus populaire et l’une des raretés les plus recherchées.
- Dracaufeu Crystal Holo Skyridge (2003) – environ 23 000 € : les cartes Crystal de l’ère e-Reader ont une mécanique de jeu spéciale et un design magnifique, ce qui les rend très populaires auprès des collectionneurs.
Bientôt une carte Pokemon à 10 000 000 € ?
Soyons honnêtes deux minutes. Quand on voit qu’une carte Pokémon unique s’est vendue au prix de plusieurs appartements parisiens, la première réaction est simple : c’est de la pure folie. On parle d’un morceau de carton imprimé, pas d’un tableau de maître ou d’un diamant historique. Il y a de quoi être sceptique et voir tout ça comme une immense bulle spéculative prête à exploser. Et en partie, ce n’est pas faux.
Mais réduire ce phénomène à une simple bulle spéculative serait passer à côté de l’essentiel. Le véritable cœur du réacteur, le carburant qui alimente cette machine folle, ce n’est pas l’argent. C’est la nostalgie.
Ces cartes sont des portails temporels. Elles nous ramènent instantanément dans la cour de récréation, à une époque plus simple, à nos premiers échanges, à la joie pure de découvrir un Dracaufeu brillant. Les collectionneurs qui dépensent des fortunes aujourd’hui sont souvent les enfants des années 90 qui, à l’époque, n’avaient pas les moyens de s’acheter tous les boosters qu’ils voulaient. Aujourd’hui, avec un compte en banque d’adulte, ils ne font pas qu’acheter une carte : ils achètent un morceau de leur enfance, ils réalisent un rêve de gosse. Et ça, ça n’a pas de prix.