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Hellblade 2 : une durée de vie un peu courte ?

L’attente fut longue, quasi insoutenable, mais elle est enfin là. L’œuvre que l’on nous promettait comme une révolution technique, une plongée encore plus profonde dans l’enfer de la psychose, a débarqué sur nos écrans. Senua’s Saga: Hellblade II est arrivé, et il a mis une claque monumentale à toute l’industrie.

Ce voyage sensoriel, cette expérience quasi mystique développée par les magiciens de Ninja Theory, a tenu toutes ses promesses visuelles et auditives. On en ressort secoué, marqué, hanté par les paysages islandais et les murmures incessants qui accompagnent Senua. Mais une fois le générique de fin atteint, une question revient inévitablement, alimentant déjà d’intenses débats : combien de temps dure vraiment l’aventure ? Est-ce que ce chef-d’œuvre annoncé n’est pas, au final, un peu trop court ?

On a bravé les côtes islandaises, affronté les draugar et écouté attentivement les Furies pour vous livrer le verdict le plus complet sur la durée de vie de Hellblade II. Alors, simple traversée ou véritable saga ?

La durée de vie : entre 7h30 et 9h pour toucher au divin (et à la folie)

Soyons directs, car le temps est précieux, même pour une guerrière picte. Si vous vous demandez combien d’heures il vous faudra pour voir le bout de l’odyssée islandaise de Senua, la réponse est assez claire et confirmée par la majorité des joueurs et des critiques : comptez entre 7 heures 30 et 9 heures de jeu.

Oui, c’est court. Très court, même, si l’on compare aux standards actuels des jeux AAA en monde ouvert qui nous promettent des centaines d’heures. Pour finir Hellblade II en ligne droite, en se concentrant sur l’histoire principale, vous en aurez probablement pour environ 8 heures. Si vous prenez le temps d’explorer un peu plus, de chercher les collectibles (les visages cachés et les piliers de lore) et de vous imprégner de l’atmosphère, vous pourrez peut-être pousser jusqu’à 9 heures, voire 10 heures pour les plus contemplatifs.

Mais est-ce vraiment un défaut ? Dès l’annonce de cette durée de vie, les critiques ont fusé. « Trop court pour un jeu vendu plein pot ! », « Une simple démo technique ? », « On reste sur notre faim ! ». Ces réactions sont compréhensibles, mais elles passent peut-être à côté de l’essentiel. Hellblade II n’a jamais été vendu comme un RPG de 100 heures. C’est une expérience narrative intense, cinématographique et extrêmement concentrée. Chaque minute est pensée, chaque scène est maîtrisée. Il n’y a pas de gras, pas de quêtes Fedex, pas de remplissage inutile. C’est un voyage court, certes, mais d’une densité et d’une puissance rares.

Autopsie d’un voyage sensoriel : histoire, studio, chiffres…

Pour bien comprendre Hellblade II, il faut revenir aux bases. C’est la suite directe de Hellblade: Senua’s Sacrifice, sorti en 2017. Ce premier opus avait déjà marqué les esprits par sa représentation audacieuse et respectueuse de la psychose, basée sur des recherches approfondies avec des experts et des personnes concernées. On y suivait Senua, une guerrière picte traumatisée, lors de son voyage désespéré à travers Helheim pour sauver l’âme de son bien-aimé, Dillion.

  • Le studio : Ninja Theory, les maîtres de l’immersion. Derrière cette saga se cache le studio britannique Ninja Theory, basé à Cambridge. Ce ne sont pas des débutants. On leur doit des pépites comme Enslaved: Odyssey to the West, DmC: Devil May Cry ou encore le jeu multijoueur Bleeding Edge. Racheté par Microsoft / Xbox Game Studios en 2018, le studio a bénéficié de moyens décuplés pour réaliser sa vision pour Hellblade II. Leur marque de fabrique ? Une maîtrise absolue de la technologie (motion capture, animation faciale) au service de la narration et de l’émotion, et un engagement fort pour la représentation de la santé mentale.
  • L’histoire : la quête islandaise de Senua. Hellblade II reprend peu après la fin du premier jeu. Ayant accepté sa condition et les voix qui l’habitent (les Furies), Senua n’est plus une victime. Elle est devenue une guerrière déterminée. Son nouvel objectif ? Se rendre sur les côtes hostiles de l’Islande du Xe siècle pour traquer et affronter les Vikings qui ont réduit son peuple en esclavage. Mais son voyage ne sera pas une simple quête de vengeance. Elle va découvrir une terre marquée par les mythes, les géants et les dieux, et surtout, par la tyrannie d’hommes cruels. Elle devra non seulement se battre contre ses démons intérieurs, mais aussi contre des ennemis bien réels, et peut-être même inspirer d’autres esclaves à se soulever.
  • Les personnages : Senua et les voix. Le cœur absolu du jeu reste Senua, magistralement interprétée par Melina Juergens (qui n’était même pas actrice au départ, mais monteuse vidéo chez Ninja Theory !). Sa performance, capturée avec une précision hallucinante, est l’une des plus grandes de l’histoire du jeu vidéo. Les Furies, ces voix multiples qui murmurent, commentent, encouragent ou critiquent Senua en permanence, sont toujours là, plus présentes que jamais grâce à un travail sur l’audio binaural qui vous glace le sang (jouer au casque est OBLIGATOIRE). Le jeu introduit aussi de nouveaux personnages importants, comme Thórgestr, un chef d’esclaves dont le destin va se lier à celui de Senua, ou Illtauga, une mystérieuse antagoniste liée aux mythes locaux.
  • La technologie : l’Unreal Engine 5 dans toute sa splendeur. Hellblade II est l’une des plus belles vitrines technologiques de l’Unreal Engine 5. Le niveau de photoréalisme atteint est tout simplement bluffant. Les paysages islandais, reconstitués avec une fidélité maniaque, sont à couper le souffle. Les visages des personnages sont d’un réalisme saisissant. C’est une véritable leçon technique.

Pourquoi j’ai adoré Hellblade 2 (malgré sa courte durée)

Oui, le jeu est court. Mais chaque minute passée en Islande avec Senua est une minute qui marque. Voici pourquoi, selon moi, Hellblade II est une réussite majeure.

  • La claque visuelle absolue. On l’a dit, mais il faut le répéter : le jeu est sublime. C’est simple, c’est l’un des plus beaux jeux jamais créés. La puissance de l’Unreal Engine 5 est utilisée à son plein potentiel pour créer des environnements d’un réalisme confondant. La lumière, les textures, les effets météorologiques… Chaque plan est une peinture, une photographie. Explorer les plages de sable noir, les grottes cristallines ou les falaises battues par les vents est une expérience contemplative en soi.
  • L’immersion sonore inégalée. Le travail sur le son est peut-être encore plus impressionnant que les graphismes. L’utilisation de l’audio binaural est poussée à son paroxysme. Les voix des Furies vous enveloppent, vous chuchotent à l’oreille, créant un sentiment d’immersion (et de malaise) absolument unique. Les bruitages, la musique tribale envoûtante… tout contribue à créer une atmosphère pesante et hypnotique. C’est une masterclass de sound design.
  • La performance de Melina Juergens. Elle EST Senua. Sa performance est stratosphérique. Chaque regard, chaque cri, chaque moment de doute ou de rage est retranscrit avec une justesse incroyable. Elle porte le jeu sur ses épaules et nous fait ressentir toute la complexité de son personnage. C’est une leçon d’acting.
  • Une intensité narrative maîtrisée. Justement parce qu’il est court, le jeu ne perd jamais son rythme. L’histoire est dense, intense, et ne nous laisse aucun répit. Chaque scène a du poids, chaque combat a du sens. Ninja Theory a fait le choix d’une expérience cinématographique, sans temps mort, et c’est une réussite.

Plus court mais plus intense ?

Revenons à ce fameux débat. Est-ce qu’un jeu de 8 heures peut justifier son prix et son statut de blockbuster ? Pour moi, la réponse est un grand oui.

Critiquer Hellblade II pour sa durée de vie, c’est un peu comme critiquer un film de 2 heures parce qu’il ne dure pas aussi longtemps qu’une série de 10 saisons. Ce sont des formats différents, avec des intentions différentes. Ninja Theory a choisi de raconter une histoire précise, avec un début, un milieu et une fin, de la manière la plus impactante possible. Rallonger artificiellement le jeu avec des quêtes annexes inutiles ou des zones à explorer sans intérêt aurait dilué le propos et affaibli l’expérience.

Le jeu est court, mais il est exceptionnellement dense et poli. Chaque détail est soigné, chaque seconde est optimisée. C’est une expérience qui privilégie la qualité à la quantité. Et dans une industrie souvent obsédée par les chiffres et les contenus gargantuesques mais vides, cette approche est non seulement respectable, mais aussi rafraîchissante.

De plus, il ne faut pas oublier un facteur clé : le jeu est disponible Day One sur le Game Pass. Pour les abonnés, la question du rapport durée de vie / prix ne se pose même pas. C’est une occasion en or de découvrir ce chef-d’œuvre sans dépenser un centime de plus. Pour les autres, il faut le voir comme l’achat d’un billet pour une expérience unique, un voyage sensoriel et émotionnel que peu d’autres jeux peuvent offrir.

Senua’s Saga: Hellblade II n’est peut-être pas le jeu le plus long de l’année, mais c’est sans aucun doute l’un des plus marquants. C’est une œuvre d’art vidéoludique, une prouesse technique et narrative qui vous hantera longtemps après avoir posé la manette. Sa courte durée n’est pas un défaut, c’est un choix. Le choix de l’intensité, de la concentration, de l’impact. Et c’est un choix qui, à mes yeux, est une immense réussite. Ne passez pas à côté.

Konohate

Passionné par le Japon et la culture geek depuis le plus jeune âge, je partage mon univers.